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Une bourse déconnectée de l’économie ? Le scénario d’Orcadia AM

Source : Orcadia Asset Management 

Comment expliquer la déconnexion apparente entre la situation économique incertaine dans laquelle nous nous trouvons et la bourse qui devient, de son côté, de plus en plus confiante ? Lisez ci-dessous l’interview d’Etienne de Callataÿ*, économiste belge reconnu et fondateur d’Orcadia AM, pour connaître la réponse. Depuis peu, vous pourrez trouver les fonds d’Orcadia Asset Management sur notre plateforme en tapant « Orcadia » dans le navigateur (ou en sélectionnant « FundPartner Solutions (Europe) S.A. » dans le filtre « Fournisseur de fonds »).

La Bourse a largement rebondi depuis le creux de début d’année, alors que la récession économique est profonde et que de lourdes incertitudes sur la Covid-19 subsistent. Cela pose question.

La Bourse évolue-t-elle toujours au gré des nouvelles économiques ? 

Etienne de Callataÿ : « Il est logique qu’il y ait une différence entre conjoncture économique et bourse. La bourse reflète ce que les actionnaires des entreprises cotées sont prêts à
payer aujourd’hui pour avoir droit aux bénéfices futurs, nets d’impôts, et cela tant à court terme qu’à moyen ou long terme. Cela signifie qu’une crise profonde, si on anticipe qu’elle
sera suivie par un rebond intégral et rapide, ne doit guère faire perdre de plumes à la bourse. La bourse doit être comme le randonneur à la montagne qui regarde au loin, « au-delà de la vallée ».
Aujourd’hui, les indicateurs conjoncturels laissent penser aux marchés que la crise sera oubliée d’ici 2 à 3 ans, et que les bénéfices futurs seront au rendez-vous. Ceci dit, dans le passé, la
bourse n’a pas rarement été myope et a souvent surréagi aux évolutions de court terme. C’est sa sérénité dans la crise actuelle qui frappe ! »

“La bourse doit être comme le randonneur à la montagne qui regarde au loin, « au-delà de la vallée “

Comment réconcilier cette attente, en bourse, d’une remontée prochaine des bénéfices et les annonces d’une explosion à venir du nombre de faillites ?

EdC : « Deux éléments explicatifs peuvent être mis en exergue. Le premier est que si les faillites concernent des secteurs comme l’Horeca, le commerce ou les agences de voyages, cela ne va pas se traduire directement
sur les marchés car les entreprises concernées ne sont pas cotées en bourse. Si au lieu d’aller au cinéma ou dans une boutique, les gens se tournent vers Netflix et Amazon, cela induit un glissement dans le chiffre
d’affaires et donc dans les bénéfices au profit de ceux d’entreprises cotées en bourse. Bien sûr, il faut aussi tenir compte du fait que la faillite du cafetier va réduire son pouvoir d’achat et
donc, potentiellement, ses dépenses chez Netflix et Amazon.

Le second est que, même si cela paraît cruel, les faillites ne sont pas nécessairement négatives pour l’économie et pour les profits. L’économie a, en fait, besoin de faillites ! L’électricité
a généré des faillites parmi les fabricants de chandelles, mais l’économie y a gagné, et l’automobile n’a pas fait les affaires des maréchaux-ferrants. Les faillites sont le corollaire inévitable
du progrès technologiques et des changements dans les préférences des consommateurs. De plus, il est sain qu’une entreprise moins efficace « disparaisse » au bénéfice de celle qui fait
un meilleur usage de ressources rares. Les faillites ont, en outre, pour effet de réduire, du moins temporairement, la concurrence, ce qui permet aux survivants d’augmenter leurs prix et donc leurs profits. »

La politique des banques centrales contribue-t-elle à expliquer ce divorce apparent entre économie et bourse ?

EdC : « Oui, très certainement. Puisque l’économie va mal, les banques centrales ont accentué le caractère accommodant de leur politique, faisant encore davantage baisser les taux d’intérêt.
Elles le font pour encourager les ménages à consommer, que ce soit en réduisant leur épargne ou en s’endettant davantage, pour stimuler les entreprises à investir et pour que les Etats, fort endettés,
n’aient pas à payer de lourdes charges d’intérêt et se lancent dans des programmes de soutien budgétaire à l’économie. Cette politique a pour effet de rendre l’épargne prudente
encore moins attractive, avec même une perte de pouvoir d’achat significative à la clef puisque le taux d’inflation est supérieur au taux d’intérêt. Ceci incite les investisseurs à se tourner
vers des actifs plus risqués, dont les actions.  Une autre manière de voir le lien entre taux d’intérêt et bourse est au travers de la notion d’actualisation des bénéfices futurs, à
savoir que, quand les taux d’intérêt baissent, les bénéfices futurs valent plus en argent d’aujourd’hui. La baisse des taux a aussi pour effet positif sur les actions de réduire le risque de faillite
des entreprises cotées endettées. Et, cerise sur le gâteau, les banques centrales considèrent que si la baisse des taux a pour effet de favoriser la bourse, c’est tout bénéfice pour l’économie
via ce qui est appelé un « effet richesse ». C’est surtout vrai là où les salariés ont une épargne-retraite investie en actions : si les cours baissent, ils se sentent
appauvris et consomment moins tandis que, si les cours montent, ils se sentent plus à l’aise et dépensent davantage. »

“Et, cerise sur le gâteau, les banques centrales considèrent que si la baisse des taux a pour effet de favoriser la bourse, c’est tout bénéfice pour l’économie via ce qui est appelé un « effet richesse »”

Pour payer la facture de la crise, les pouvoirs publics ne vont-ils pas taxer davantage les actionnaires ?

EdC : « Qui va payer pour l’énorme trou budgétaire occasionné par la crise sanitaire, le confinement et les mesures de soutien adoptées par les pouvoirs publics ? De manière synthétique,
il y a 4 réponses, 4 pistes pour un Etat fortement endetté : mener une politique d’austérité, rembourser en monnaie de singe grâce à de l’inflation, annuler la dette et s’accommoder d’une
dette élevée.

Pour ce qui est de l’austérité, cela semble peu vraisemblable car il ne s’agira pas de couper les ailes à une économie en voie de reprise et de transition environnementale. Certes, des impôts pourraient être
relevés : il est question, en Europe et à l’OCDE, de taxer davantage les multinationales, du numérique notamment, et la pollution, aux Etats-Unis, J. Biden parle de relever le taux de l’impôt des sociétés
de 21 à 28% et, en Belgique, d’aucuns évoquent la taxation des plus-values boursières quand d’autres, dont le Voka (le patronat flamand), penchent pour l’alourdissement de la fiscalité immobilière.
Simultanément, la désirabilité d’alléger les cotisations sociales et de soutenir l’entrepreneuriat sont renforcées par la crise de la Covid-19.

L’inflation a, historiquement, été fréquemment une manière pour les Etats de réduire le poids effectif de leur endettement. Aujourd’hui, toutefois, une telle résurgence est perçue comme hautement
improbable par les marchés. Cela ressort très clairement de la très grande faiblesse des taux d’intérêt à long et très long terme.

L’histoire a aussi souvent connu la troisième piste, celle de l’annulation de la dette publique. Ici, il serait question d’annuler des dettes détenues par les banques centrales à concurrence du coût de la crise
de la Covid-19. Cette solution a des avantages, mis en avant entre autres par le Prof. Paul De Grauwe, mais reste largement un tabou mental dans l’Union européenne d’aujourd’hui, ce qui la rend peu probable.

Au total, le scénario le plus vraisemblable est la quatrième piste, dite du financement monétaire, à savoir un financement des pouvoirs publics par la banque centrale, et cela de telle sorte qu’il ne coûte rien ou quasi-rien en termes nets aux pouvoirs publics.
Ce qui est attendu est donc un taux d’endettement public élevé mais des charges d’intérêt effectives légères ! Dans ce cas, nous nous accommoderons d’une dette publique à la fois
élevée et sans volonté de la faire rapidement baisser. Cela induit que cet endettement n’imposera pas un tour de vis fiscal venant durement frapper les entreprises et leurs actionnaires. Cet apaisement est renforcé
par l’attitude « constructive », voire « complaisante » adoptées par les autorités à l’encontre du monde de l’entreprise privée depuis l’éclatement
de la crise. En témoignent les aides sous forme de chômage temporaire, les injections de capitaux – à des conditions sympathiques – dans de grandes entreprises aériennes ou automobiles, le relâchement des
exigences de fonds propres des établissements de crédit, les subventions de la BCE aux banques ou l’assouplissement des règles en matière d’aide d’Etat et de concurrence au sens large. »

La bourse ne serait donc pas irrationnelle et y investir ne serait donc pas insensé ?

EdC : « La bourse est sujette à excès, tant à la hausse qu’à la baisse. Ici, face à la Covid-19, elle a violemment baissé, mais cela se comprend, tant l’incertitude sanitaire et économique
était grande, avant de se reprendre. Sur la base des informations disponibles et des risques identifiables, qu’il s’agisse de bénéfices, de taux d’intérêt ou de fiscalité, les bourses ne semblent
pas outrageusement chères. Les perspectives bénéficiaires de moyen terme ne sont pas minées par la Covid-19, les pouvoirs publics offrent un filet de sécurité à l’économie et aux actionnaires et les banques centrales font, avec leur taux d’intérêt « raplapla », que la prime de risque offerte par les bourses resteattractive.

En même temps, dans un portefeuille donné, normalement constitué, en proportions variables, d’actions et d’obligations, il faut voir que la poche obligations sert usuellement d’amortisseur en cas de mauvaise nouvelle.
En effet, à l’annonce de celle-ci, la valeur des actions diminue mais, grâce à la baisse concomitante des taux d’intérêt, celle des obligations augmente. Or, avec des taux au plancher, on ne peut plus compter
sur cette baisse des taux et donc sur un effet amortisseur de obligations. Et sans amortisseur, il faut rouler de manière plus prudente ! Le portefeuille se doit donc d’être un peu moins investi en actions que s’il y
avait de l’espace pour une baisse des taux d’intérêt. Si on ajoute les incertitudes actuelles, liées à la Covid-19 (seconde vague, vaccin, …) ou non (élections américaines, tensions géopolitiques,
…) et certaines valorisations laissant peu de place à la déception, notamment dans le secteur technologique, une certaine sous-pondération en actions semble indiquée. C’est la stratégie actuellement
suivie au sein du fonds patrimonial d’Orcadia AM. »

*Etienne de Callataÿ est économiste, chargé de cours à l’Université de Louvain (UCL) et de Namur et cofondateur d’Orcadia AM. Orcadia AM est une société
de gestion fondée en 2016 par un quatuor d’ex-dirigeants d’un leader belge en private banking. Elle défend une éthique professionnelle et sociétale ambitieuse et promeut activement l’investissement responsable,
et cela au service à la fois du bien commun et de l’investisseur.

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